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Les Portes de Gascogne au Conseil Général : vœux de Patrick Jiména

logo-npdg-cg.jpgLa première retombée de notre campagne lors des dernières élections cantonales, hors le discours très instructif de Pierre Izard, est venu s'introduire dans l'enceinte de la dernière session du Conseil Général sous la forme d'un vœu présenté par le tout nouveau conseiller Patrick Jiména. Une promesse faite lors de la campagne, promesse tenue !

Une partie du texte a été présentée le lundi 20 juin, mais n'a pas pu cheminer plus loin, les procédures et arcanes de l'institution ont fait le nécessaire pour l'arrêter en route. Gageons que le vaillant conseiller trouvera les portes autres que celles de Gascogne pour revenir à la charge lors de sessions ultérieures.

Voici le texte de son intervention :

Le projet de Méga-Centre commercial « Les portes de Gascogne » est toujours d’actualité à Plaisance du Touch. De nombreux opposants se sont manifestés depuis plusieurs années et nous connaissons tous le succès populaire des manifestions contre ce projet organisées sur le Plateau de la Ménude, terrain tant convoité par les promoteurs.
M. Le Président, vous connaissez bien ce projet que vous suivez de près depuis de longs mois. Vous avez rencontré la plupart des acteurs concernés.
Le 19 mars, Monsieur Le Président, vous avez déclaré que des contentieux administratifs étaient encore en cours et que le dossier était loin d’être arrêté d’un point de vue administratif. Vous avez également déclaré que le Conseil Général était devenu par la force des choses le dernier rempart contre l’ouverture du chantier de la construction de ce centre commercial. C’est dire notre responsabilité collective, vous en conviendrez.
Jusqu’à ce jour, et nous ne pouvons que nous en féliciter, le Conseil Général a refusé d’aliéner un morceau de route départementale. Il a refusé de rétrocéder le terrain d’assiette de cette voirie à la commune de Plaisance du Touch.  C’est à ce niveau, outre les  contentieux en cours, que se situe le dernier verrou pour la construction de ce méga centre commercial.
Mais au-delà des aspects techniques, si importants soient-ils, au-delà des études d’impacts en cours sur la voirie, au-delà de l’ensemble des précautions habituelles quand à la légalité de nos décisions, il s’agit aujourd’hui de se positionner sur le plan du sens politique et de la cohérence entre nos valeurs et nos actes.

Ce projet est à l’opposé des valeurs d’Europe Ecologie-Les Verts, de celles des socialistes, et du Front de gauche, autant du point de vue économique que social et environnemental. Je vous rappelle également qu’un accord a été signé entre nos deux formations politiques, pour que conjointement nous nous opposions ensemble à la réalisation d’un tel projet.
Mais qu’en est-il d’une société qui s’est construite depuis les années 60 à partir d’un développement exponentiel des grandes surfaces à la périphérie de nos villes ?
Chacun sait que leur développement a changé radicalement le paysage de nos commerces. Chacun connait aujourd’hui l’impact de la grande distribution sur le monde agricole qui au fur et à mesure du temps s’est retrouvé étranglé par des pratiques commerciales de plus en plus dures.
Les eldorados de l’hyperconsommation, que sont les complexes commerciaux géants, sont condamnés. Pour des raisons sociologiques, environnementales et économiques. Le lent mais constant mouvement de désaffection par les ménages de la grande distribution, est une conséquence d’un report de l’achat futile vers l’achat utile.

Le modèle des grands mall américains qui captent le chaland pour la journée par des activités mêlant grande consommation, loisirs, consommation de culture et de services relève d’une vision passéiste de l'économie. Les américains s’en détournent au profit d’autres manières de consommer. Plus de 30% des américains seraient devenus à ce jour ce que l’on nomme des créatifs culturels. A savoir des individus et familles qui ont entrepris un changement radical de manière d’être et de construire leurs vies.
En Europe, la grande distribution elle même amorce sa conversion, en privilégiant la création de commerces de taille moyenne à proximité ou au cœur des centres ville.

Aussi, les coulisses du projet cachent des modalités d’investissement inquiétantes. Ces investisseurs sont encore adossés à des fonds de pensions spéculatifs nord américains. La bataille que se livrent ces investisseurs et grands groupes n’a pas d’autre vocation qu’à engendrer des bulles spéculatives. Et le propre de cette spéculation, vous l’avez compris, n’est pas de se soucier de l’augmentation du PIB, de l’analyse qualitative des produits et encore moins du bien-être des habitants.
Nous savons tous que les énormes bénéfices générés par ces grands centres commerciaux sont directement redistribués aux actionnaires toujours mieux servis à la table de la répartition des richesses. De l’autre côté de l’échelle, les salariés doivent de plus en plus se battre, ne serait-ce que pour que leurs droits soient respectés (la décision de justice la semaine dernière contre le groupe Carrefour le démontre encore une fois).
Le 11 mars 2010, Martin Malvy, Président de la région Midi-Pyrénées déclarait au sujet de ce dossier :
« La seule logique des investisseurs ne saurait en aucune manière servir de justification. Il ne saurait y avoir de dérogations à ces contraintes dans le respect des citoyens, du développement durable et du maintien des équilibres commerciaux de proximité »
La grande distribution ruine le tissu commercial de proximité vers lequel le consommateur se tourne de plus en plus en ces temps de crise et de difficultés économiques. Les experts ont démontré que chaque emploi créé dans la grande distribution détruit entre trois et cinq emplois dans les environs. Depuis l’installation du Leroy-Merlin à Colomiers, tous les petits et moyens magasins de bricolage ont disparu des centres villes de l’ouest.
Pour le consommateur, l’arrivée de ces grands centres commerciaux n’est pas une bonne nouvelle. Les experts ont étudié nos habitudes de consommation. Ils ont démontré que les dépenses d’un ménage qui fréquente régulièrement ces complexes commerciaux sont en moyenne 40% plus élevées que celles d’un ménage qui fait ses courses dans un supermarché de taille moyenne.
A quoi aspirent de plus en plus nos concitoyens ? A trouver près de chez eux des commerces et des services de proximité. De la convivialité. Nous sommes de plus en plus nombreux à ne plus nous laisser piéger par les mirages du suremballage, de l’agression consumériste, de la pub qui génère de la frustration, quand ce n’est pas de l’endettement pour les plus fragiles.

Tous les seaux de peinture verte qui seront déversés sur les Portes de Gascogne pour les rendre grenello et climato-compatibles ; toutes les stratégies qui seront déployées pour transformer ces temples du consumérisme en lieux où règnerait le bonheur d’acheter, seront vaines.
Presque tous les groupes de la grande distribution ont compris l’évolution des mentalités. Ils installent de plus en plus de petites et moyennes surfaces à proximité des clientèles.
A l’heure de l’impérieuse nécessité d’une sobriété énergétique, l’idée d’éloigner les habitants de leurs centres commerciaux est devenue saugrenue et anachronique. Nous devons renforcer les équipements commerciaux dans les cœurs de ville et à l’entrée des villes plutôt que de laisser s’installer ces méga-centres dévoreurs d’espaces naturels en pleine campagne. Dans un ouest Toulousain déjà sérieusement englué dans les difficultés de circulation, il est aberrant d’autoriser la création d’un nouveau centre commercial où l’on ne pourra se rendre qu’en voiture.
Monsieur le Président, il s’agit ici de prendre une décision politique dans le droit fil de nos aspirations respectives à créer une autre société. Une société plus fraternelle, une société qui se prépare enfin aux enjeux de demain en reconsidérant nos manières de vivre et de consommer. Une société qui reconsidère son rapport au temps et aux relations entre l’ensemble des citoyens.
En ne permettant pas la réalisation de ce Méga Centre commercial, les Portes de Gascogne, le Conseil Général de la Haute-Garonne signerait là non pas un acte de bravoure mais bien plus un acte de résistance face aux forces destructrices de l’argent.

 

Patrick Jiména - Conseiller Général EELV - Canton TOULOUSE XIII

 

 

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