Projet Val Tolosa : Pour les «anti», rien n’est joué - Le Journal Toulousain
Le Journal Toulousain à publié l'interview de la présidente du collectif «NON à Val Tolosa», suite à l'article «Projet Val Tolosa: Les délais seront tenus» publié un peu plus tôt. Dans ce précédent article, le promoteur faisait part de sa grande confiance quand à l'ouverture pour 2016 et au démarrage des travaux en fin d'année, cela appelait donc une réponse de notre part que l'hebdomadaire nous a accordé.
L'article est disponible sur le Journal Toulousain en ligne : «Projet Val Tolosa - Pour les "antis", rien n'est joué»
N'hésitez pas à acheter ce quotidien qui paraît tous les jeudi, chez votre marchand de journaux. En attendant, vous pouvez retrouver l'intégralité des propos du collectif ci-après :
Projet Val Tolosa - Pour les "antis", rien n'est joué.
Si Unibail Rodamco, propriétaire et gestionnaire du futur Val Tolosa, affirme que le centre commercial ouvrira ses portes en 2016, les opposants au projet ne l'entendent pas de cette oreille. Jutta Dumas, présidente du collectif “Non à Val Tolosa - Portes de Gascogne”, ne renonce pas et revient sur sa version du projet, dénonçant celle d'Unibail Rodamco et l'inertie des dirigeants politiques locaux.
Jutta Dumas, qu'est-ce que votre association reproche au projet Val Tolosa ?
L'argument premier est que ce centre commercial est inutile, positionné sur le plateau de la Ménude (Plaisance-du-Touch). Même le promoteur avoue que les riverains ne se trouvent qu'à dix minutes du centre commercial de Blagnac, et une multitude de centres intermédiaires restent à leur disposition, il n'existe donc aucun besoin particulier. Et quand Unibail Rodamco évoque le dés-engorgement des autres centres commerciaux de l'agglomération toulousaine, nous ne parlons que de pointes de fréquentation exceptionnelles, à Noël et lors des soldes. De plus, l'argumentation du promoteur basée, en 2ooo, sur le manque d'offres commerciales dans ce secteur ne tient plus car, depuis, la société de consommation s'est réorganisée, de petits centres commerciaux ont émergé et le e-commerce s'est développé. L'offre ne manque donc pas, il s'agit uniquement d'un manque d'attractivité.
En ce qui concerne l'aménagement du territoire, vous dénoncez les infrastructures annoncées, notamment la construction de la RD 92/, qui devrait voir le jour avec Val Tolosa. Selon Unibail Rodamco, il s'agit d'un barreau routier qui servirait également aux riverains...
Nous craignons beaucoup l'engorgement des voix d'accès dans notre secteur de Plaisance-du-Touch, Tournefeuille, Colomiers... Cette zone est déjà surchargée par les trajets aux heures de pointe, induits par l'activité aéronautique. Si les camions d'approvisionnement de Val Tolosa et le flux des clients s'y rajoutent, cela deviendra ingérable. Et lorsqu'Unibail Rodamco explique que ce barreau sera utile aux riverains, c'est plutôt pernicieux car ce dernier ne verra le jour que si Val Tolosa sort de terre. C'est d'ailleurs là que se trouve notre plus grand espoir: faire en sorte que le Conseil général, qui détient le pouvoir décisionnaire quant à la construction de cette route, se rende compte que cette départementale coûtera cher. Il n'est donc pas certain que ce barreau soit construit, avec ou sans centre commercial. Et à l'argument de l'utilité de la RD 924 pour les riverains, je réponds : pour aller où ? Cette route débouchera sur la déviation de Léguevin, tant attendue par les habitants, pour finalement l’engorger de nouveau ! Il s'agit en réalité d'opposer l'intérêt particulier à l'intérêt collectif.
La mort annoncée des petits commerces
Concernant l'emploi, Unibail Rodamco annonce la création de 2.000 postes une fois Val Tolosa ouvert. Qu'en pensez-vous ?
Des études ont démontré que pour un emploi créé dans un centre commercial, entre trois et cinq emplois sont détruits dans les cinq ans, sur les communes avoisinantes. Ainsi, de nombreux commerces de la Salvetat, Tournefeuille, Plaisance-duTouch, Pibrac, Léguevin, etc, vont fermer petit à petit. Mais cela n'est pas visible, ces gens-là‘ pleurent seuls dans leur coin. Sans parler de la concurrence que cela amènera aux centres commerciaux déjà existants. Certes, les emplois annoncés seront pérennes et non-délocalisables mais combien en auront—ils détruit pour cela ? Il s'agit donc d'une grande menace pour les petits commerçants du secteur.
En matière d'environnement, Unibail Rodamco s'est engagé à prendre en compte le développement durable dans son projet. Est-ce suffisant pour vous ?
Ils sont obligés de le faire. La loi leur impose un aménagement durable. C'est donc une simple annonce rhétorique puisque, qu'ils le veuillent ou non, leur projet ne peut aboutir sans la prise en compte du développement durable, ce n'est en aucun cas un choix de leur part. Dans un même temps, tous les dix ans, l'équivalent d'un département entier de terres agricoles disparaît au détriment des constructions bétonnées. Il faut bien sûr garder à l'esprit que la démographie en augmentation engendre un besoin de logements et donc de constructions, mais je tiens à soulever une incohérence en matière d'urbanisme : nous sommes prêts, au nom de la densification, à bâtir des tours pour loger les Français en occupant le moins d'espace possible, quand on permet à des surfaces commerciales de s'étaler à l'infini. C'est une énigme pour nous!
L'inertie des politiques
Quel est votre sentiment aujourd'hui, le projet étant bien avancé ?
Nous avons l'impression de réaliser le travail des politiques qui sont censés arbitrer entre intérêt général et particulier, mais n'étant pas d'accord entre eux... Louis Escoula, le maire de Plaisance-du-Touch, qui défend le projet, est membre du Parti Socialiste et le maire de Tournefeuille, Claude Raynal, farouche opposant est également PS. Ainsi, au sein d'une même famille politique, ils ne sont pas sur la même longueur d'onde. Notre association vient donc combler un vide, créé par les politiques qui ne font pas leur travail. Mais nous ne sommes pas force de proposition, et nous leur demandons de proposer de nouveaux projets d'aménagement de la Ménude en fonction des besoins de la population. Et le “rien du tout" serait peut-être une solution. Nous pensons qu'un espace naturel ou des terres agricoles devraient être envisagés.
Qu'est-ce qui pourrait invalider cette dernière option ?
L'argent et la politique ! Plaisance-du-Touch ne faisant pas partie de Toulouse Métropole, elle ne bénéficie pas des revenus de la communauté urbaine. Ainsi, ce que voit le maire Louis Escoula, ce sont les retombées économiques de Val Tolosa. C'est légitime, la ville a besoin de recettes fiscales mais pas à n'importe quel prix. La solution serait donc que Plaisance, et les communes attenantes, intègrent enfin Toulouse Métropole et puissent ainsi maintenir une zone naturelle tout en étant rétribués pour cela. Là serait l'intérêt général, mais la guerre des chefs au sein du Parti Socialiste semble plus forte. Et c'est la population qui en souffre.
Quel recours vous reste-t-il alors pour empêcher ce projet de sortir de terre ?
Nous attendons maintenant la décision du tribunal qui devrait tomber en septembre, et nous sommes confiants. Le permis de construire est basé sur l'enquête publique que nous contestons. Ainsi, si nous gagnons, tout sera annulé. Mais que la décision aille dans notre sens ou dans le leur, le perdant fera forcément appel. Ce n'est donc pas terminé !
Propos recueillis par Séverine Sarrat